ESSÉNISME ET BOUDDHISME
PAR
M. ANDRÉ DUPONT-SOMMER
SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
Mes chers Confrères, Mesdames et Messieurs,
II y a trois ans, en novembre 1977, j'eus l'honneur de vous présenter sous cette Coupole de l'Institut une lecture intitulée « Trente années de recherches sur les manuscrits de la mer Morte (de 1947 à 1977) ». Ces manuscrits, hébreux et araméens, se datent approximativement de l'an 150 av. J.-C. à l'an 70 ap. J.-C. ; ils ont été, et ils restent, d'une importance exceptionnelle. Dès le début des recherches, l'ensemble de ces documents m'est apparu comme représentant les vestiges de la bibliothèque d'une ancienne secte juive et, plus précisément, de la maison-mère de la Communauté essénienne installée tout près de la rive occidentale de la mer Morte, à l'endroit même du ouadi Qoumrân.
Laissez-moi vous rappeler qu'au témoignage de Flavius Josèphe, historien juif du premier siècle de notre ère, le monde juif, durant les deux siècles qui précédèrent la destruction du Second Temple, en 70 de notre ère, se divisait en trois sectes : les Sadducéens, les Pharisiens et les Esséniens. Le même historien juif, en deux notices célèbres, décrivit ces Esséniens comme des mystiques, vivant en communauté, séparés du monde et du reste du judaïsme, voués pour la plupart au célibat. Vers la même époque, l'illustre philosophe juif Philon d'Alexandrie retraça aussi, avec de grands éloges, leur vie ascétique et communautaire.
D'autre part, l'auteur latin païen Pline l'Ancien, qui vivait, lui aussi, au ier siècle de notre ère, consacra aux Esséniens une notice assez courte, mais dense, qui signala avec précision et pittoresque leur rigoureuse continence, leur mépris de l'argent, leur esprit de pénitence, le grand nombre de leurs adeptes, et qui indiqua en même temps la situation de la laure essénienne : « A l'occident (de la mer Morte), lisons-nous, les Esséniens s'écartent des rives sur toute la