L'un est volubile et charmeur; l'autre est réservé et sentimental. Tous les deux, Gilbert Trigano, le père, et Serge, le fils, ont le même attachement viscéral pour le Club Méditerranée. Et aujourd'hui, à quelques mois du 50e anniversaire de la marque de loisirs la plus connue du monde, deux ans après l'éviction de Serge de la présidence du groupe, ils ont décidé d'écrire à quatre mains leur histoire du Club. Une saga colorée, peuplée de souvenirs souvent heureux, vécus, affirme Gilbert, «avec une espèce de jubilation». Le patriarche de 78 ans retrace notamment les débuts du Club et dresse le portrait de Gérard Blitz, son fondateur, qu'il a lui-même rejoint, délaissant la carrière de comédien à laquelle il se destinait. Longtemps écrasé par l'ombre de ce père charismatique qu'il adore, Serge rend hommage à la tribu des GO, un métier tellement agréable qu' «on devrait payer pour l'exercer», mais ne peut cacher son amertume d'avoir abandonné à d'autres mains l'oeuvre familiale. Car, si Gilbert a été l'homme des rêves et de l'utopie, son fils, qui lui a succédé en 1993, a été celui des chiffres et des contraintes économiques. Mais point de règlement de comptes dans ce livre que Gilbert ne voulait pas faire, plus enclin à regarder vers l'avenir qu'à se tourner vers le passé, alors que Serge, lui, avait besoin de revisiter l'Histoire. Aujourd'hui apaisé, Serge semble bien décidé à passer à autre chose. Il vient de créer, en collaboration avec le designer Philippe Starck, Triganew, qui «ne sera pas la copie du Club», promet-il. Gilbert s'en félicite: «Le fait qu'on l'ait privé du Club a, paradoxalement, accéléré son épanouissement», observe-t-il. C'est que Serge a pu, dans le même temps, se dégager de la lourde empreinte paternelle. Avec tendresse, cette valeur si chère aux Trigano...